Surprenante, attachante, palpitante, calme, kitch, moderne, artisanale, respectueuse, religieuse, superstitieuse, contradictoire…
Quand on la quitte, on y perd une petite partie de son cœur.
C’est peut être pour cette raison qu’on la surnomme la Cité des Anges avec toutes ces miettes de cœurs qui volettent autour d’elle!
La rivière Chao Phraya qui traverse Bangkok palpite d’activités. C’est un spectacle dont nous ne nous lassons pas: une danse incessante d’une rive à l’autre de bateaux-bus bondés de locaux, de bacs et de « long tail boats » qui se croisent, se contournent et évitent! -oh miracle- la descente imperturbable d’immenses barges attachées les unes aux autres.
Les accostages sont loin de se faire en délicatesse. Les conducteurs de bateaux abordent les pontons en marche arrière avec une approximative exactitude, en regardant dans des minis rétroviseurs et se laissant guider par les sifflements stridents de l’équipier à la poupe. Pour les passagers, pas de chichi type » Mind your step » : tout le monde saute allègrement sur le ponton où les prochains arrêts sont hurlés dans des hauts parleurs. Nous n’y comprenons rien, mais allons au jugé. C’est la façon bangkokienne: S’accommoder gracieusement du fatras, qui s’organise « ou pas » : de toute manière, ça s’arrange toujours!
A contrario, les Klongs dans l’ancien Bangkok sont l’antithèse de la rivière. Calmes canaux, où le temps s’écoule au rythme des écluses et où les pilotis des vieilles maisons trempent doucement dans les fonds boueux.
A terre, de larges avenues plantées sont décorées de grandes arches kitchissimes supportant de gigantesques portraits du Roi ou du couple Royal de 20 ans plus jeunes que leur âge actuel,
côtoyant immédiatement des « Sois », petites venelles qui serpentent dans des quartiers où des artisanats très anciens subsistent, comme la fabrique de bols des bonzes pour la collecte de leur nourriture quotidienne.
Les communautés se juxtaposent.
Bouddhiste majoritairement, les innombrables Wats, pagodes et monastères étincelants d’or et de mosaïques de verre surgissent inopinément dans tous les quartiers,
Mais aussi nous participons à la frénésie de la préparation du Nouvel An Chinois avec moultes décorations ainsi que l’étude sérieuse de la compatibilité du signe de l’année à venir avec son propre signe. Pour ceux pour lesquels le signe astrologique est en opposition avec l’année future, il convient de conjurer le sort: d’abord écrire scrupuleusement son nom et sa date de naissance en année bouddhique, puis s’incliner 12 fois en passant devant son corps de grands papiers dorés ou argentés achetés aux bonzes et enfin les déposer dans un grand bac qui recevra les prières sacrées …
A quelques pas, la communauté sikh se recueille autour d’un lieu de culte silencieux où les croyants peuvent prier 3 jours durant sur un livre saint écrit par la neuvième réincarnation d’un gourou hindouiste dissident….tout un programme qui échappe quelque peu à notre manque total de religiosité.
Dans la même veine, notre rationalité occidentale est grandement mise au repos quand nous effleurons les contradictions de la Thaïlande. Nous constatons dans le peuple, une quasi vénération pour la royauté qui s’accommode cependant de la junte militaire au pouvoir qui vient de frapper d’inéligibilité la principale opposante…De même, une espèce de tranquille fatalité est affichée face aux potentiels conflits de succession à la mort du Roi. Certes, le peuple a une grande affection pour la troisième princesse très active pour les Thaïs et les minorités et n’apprécie pas que le Prince héritier soit un jet setter mondain, mais comme seul les hommes peuvent accomplir des rites bouddhistes,….et si les anti royalistes ont gain de cause dans ce conflit successoral….mais tels les bateaux dans la cohue de Chao Phraya nous leur souhaitons d’accoster sans trop de heurts sur les rivages de la démocratie.
PS: nous venons d’apprendre qu’il y a eu un attentat « politique » quelques heures après notre passage dans ce secteur… hum, c’est pas gagné…
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